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À travers l’ombre noire.
La lune m'attristait, j'étais en pleurs, Rêvant, la plume à la main, le front en sueur, À ce que j'allais vous dire, À ce que j'allais écrire, En souffrant en silence, Devant la page blanche, Où nul mot radieux Ne se perdait en éclairs délicieux.
Les arbres répandaient leurs feuillages, Tout doucement, l'air sage, L'hiver allait s'achever doucement, Pour bientôt faire place au printemps. Je rêvais, vous dis-je, au calme des fleurs À venir, à l'immense majesté de nos douleurs Passées : ces vives clartés d'un hiver trop long Sous un clair de lune ne baignant pas l'horizon.
Les effets de la lune soudain s'éteignirent, On était au matin, les sources se plaignirent; Je regardais, caché dans un coin ténébreux, L'endroit où la lune éclairait les amoureux; Où l'amante s'en allait dans l'ombre avec l'amant, Et, troublés, comme on l'est en songe, vaguement, Ils sentaient par degrés se mêler à leur âme À leurs discours secrets, tous leurs regards de flamme.
L'aube se montra, j'étais assis dans mon coin Je ne savais qu’écrire; je regardais au loin Songeant, qu'importe de l'hiver le funèbre décor, Mais que l'amour demeure, et me sourie encore. Voici des fleurs, des feuilles et des branches, Ne les abîmez point de vos deux mains si blanches, Je vous laisse maintenant rêver à votre gloire, Je suis comme une rose à travers l'ombre noire.
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